Désignation du 1/3 des membres du Sénat
Désignation du 1/3 des membres du Sénat
Pas de contradiction entre l’Ordonnance 2024-001/PR du 5 Novembre 2024 et la Constitution
. Qui doit nommer les 20 Sénateurs ? Les textes parlent :
Dans l’attente de la nomination des 20 sénateurs après l’élection des 41, une polémique vaine est ouverte sur la compétence de l’autorité qui a la charge de nommer le 1/3 restant. Sur cette question, la Cour constitutionnelle a donné son avis.
L'ordonnance 2024-001/PR, comme toutes les ordonnances, a fait l'objet d'un contrôle de constitutionnalité conforme préalablement a sa signature et a sa publication comme prévu par la constitution elle même. Il n'y a donc pas de contradiction entre les deux textes. L'article 10 de la constitution et les articles 2 et 60 de l'ordonnance sont donc alignés. Pas la peine de poser la question de celui des 2 textes qui sera appliqué. Ils le seront tous les 2 car conformes. N'oubliez pas que la même constitution du 6 mai 2024 dispose que les pouvoirs du PR en fonction ne viennent à expiration qu'après l'élection du nouveau PR et désignation du PC. C'est donc bien ce que traduit l'article 60 de l'ordonnance en confiant la désignation du 1/3 des sénateurs de la première législature au PR en fonction
Le Sénat : ce que les uns et les autres ignorent !
Les élections sénatoriales du 15 février 2025 marquent un tournant décisif dans le renforcement de la démocratie et de la gouvernance socioéconomique du Togo. Le Sénat qui sera mis en place permettra non seulement d’opérationnaliser les autres institutions prévues par la Constitution du 6 mai 2024, mais aussi de décentraliser davantage le pouvoir politique en renforçant les mécanismes de régulation du fonctionnement des pouvoirs publics. Quelles sont ces innovations qui semblent incomprises par le citoyen lambda ? Quelles sont les étapes prochaines ?
Qui nomme le tiers (1/3) de sénateurs et qui doit-il nommer ? Les textes parlent !
Conformément à l’article 10 de la Constitution de la 5ème République, « le Sénat est composé pour deux tiers (2/3) de ses membres, de personnalités élues par les représentants des collectivités territoriales et pour un tiers (1/3) de ses membres, de personnalités désignées par le Président du Conseil ». L’ordonnance n°2024-001/PR du 5 novembre 2024 fixe, en son article 2, le nombre de sénateurs à soixante-un (61). Dans cette logique, les élections du 15 février 2025 ont permis d’élire quarante-et-un (41) sénateurs, soit les deux tiers (2/3). Quid du tiers de sénateurs qui seront nommés ?
Qui peut nommer le un tiers (1/3), soit les vingt (20) sénateurs afin que le Sénat puisse entrer en fonction, étant donné que le Président du Conseil n’est pas encore désigné ? Serait-on dans un vide juridique ? Cette question qui taraude l’esprit de certains compatriotes est légitime. Mais, la réponse est dans notre arsenal juridique. Cette situation est prévue et prise en compte par la constitution. Le dernier alinéa de l’article 10 de la Constitution précise qu’« une loi organique fixe le nombre de sénateurs, leurs indemnités, les conditions d’éligibilité ou de désignation, le régime des incompatibilités et les conditions dans lesquelles il est pourvu aux sièges vacants ainsi que le statut des anciens sénateurs ». Sur la base de cette disposition constitutionnelle, l’ordonnance n°2024-001/PR du 5 novembre 2024, en son article 60, précise que « Le président de la République en fonction nomme le tiers (1/3) des sénateurs de la première législature ». Le débat sur la compétence du Président de la République en fonction pour nommer les vingt sénateurs dans les prochains jours ne fait pas de doute. Les textes sont assez clairs.
Qui nommer ? La Constitution et ses textes d’application disposent que « le Prédisent du conseil » ou le « Président de la République » nomme le tiers (1/3) de sénateurs. Ainsi disposé, cette nomination relève, de ce que l’on appelle en droit, du « pouvoir discrétionnaire » ou de la « compétence discrétionnaire ». Dans le cadre du pouvoir discrétionnaire, de manière générale, l’autorité compétente dispose d’une large liberté d’appréciation de l’opportunité d’agir ou non. En matière de nomination spécifiquement, elle apprécie qui nommer et quand le faire, autrement dit, la loi n’ayant pas fixé les conditions à remplir par une personne pour être nommée, l’autorité de nomination peut nommer qui elle veut. Cette liberté lui permet d’agir avec plus d’efficacité en adaptant sa décision aux circonstances et au contexte sociopolitique. Ainsi, dans son rôle d’arbitrage et de régulation du fonctionnement des pouvoirs et en sa qualité de « garant du respect de la Constitution », Le Président de la République en fonction choisira les personnalités qu’il juge à même de contribuer à l’activité législative et à la régulation du bon fonctionnement des pouvoirs politiques dans l’intérêt général. Bonne chance à ceux et à celles qui bénéficieront de la confiance du Président de la République !
La durée du mandat des sénateurs, une rationalisation des dépenses publiques
La Constitution du 6 mai 2024 harmonise les mandats des élus et rationnalise ainsi les dépenses d’organisation des élections. Rappelons que sous la Constitution de 1992, le Mandat du Président de la République est de cinq (5) ans, celui des députés et des sénateurs qui était de cinq (5) ans est passé à six (6) ans en 2019. Les élus locaux (conseillers municipaux et régionaux) ont un mandat de six (6) ans. Cette situation fait que le Togo organise presque chaque deux ans une élection. Or, non seulement le processus électoral paralyse sur une bonne période le fonctionnement normal de l’Etat, mais aussi engendre des dépenses importantes.
La Constitution de la Vème République, tirant les leçons de cette situation, a harmonisé le calendrier électoral afin de réduire les dépenses d’organisation des élections. A l’avenir, le Togo n’organisera qu’une seule élection générale chaque six (6) ans pour élire, les députés, les conseillers régionaux et municipaux. A l’issue des résultats, les conseillers régionaux et municipaux vont élire deux tiers des sénateurs puis le Président du Conseil nomme le tiers restant. Les sénateurs (élus et nommés) et les députés se réuniront en congrès pour élire le Président de la République, tandis que la majorité au sein de l’Assemblée nationale va se charger de désigner le Président du Conseil. Que d’économie du temps et d’argent avec la Constitution de la Vème République !
Le Sénat, une institution de trop ?
Certains de nos compatriotes se demandent en quoi la mise en place du Sénat contribuera au bien être des Togolais ! Cette question, quoique légitime, mérite d’être posée autrement pour une réponse plus adaptée. Certes, la mise en place et le fonctionnement du Sénat ont un coût. Cependant, il est nécessaire de faire le bilan coût-avantage avant de prendre position. A ce titre, il est opportun de revenir sur les avantages du Sénat. Au-delà de sa contribution dans la mise en place des institutions de la Vème République, le Sénat présente des avantages pour la gouvernance politique, économique et social de l’Etat. Malheureusement, certains de ces avantages ne sont pas nécessairement matériels, ni quantifiables pécuniairement.
D’abord, la mise en place du Sénat participe à la décentralisation de l’exercice du pouvoir politique de l’Etat. Faire les lois pour régir la vie en société est l’attribution première et la plus importante de l’Etat. Désormais, l’Assemblée nationale n’a plus le monopole en la matière. Elle partage ses compétences avec le Sénat. Il peut arriver que la majorité à l’Assemblée nationale ne coïncide pas avec celle du Sénat. Dans pareilles circonstances le pouvoir de légiférer non seulement n’est plus de la seule compétence de la 1ère Chambre, mais il est réparti entre les groupes politiques représentés dans les deux Chambres.
Ensuite, le Sénat est une Chambre de régulation de l’activité législative. Il use de ses prérogatives pour réguler le processus d’élaboration des lois en renforçant non seulement leur qualité mais aussi en veillant à ce que les aspirations et préoccupations des citoyens qui ont échappé aux députés soient pris en compte. Le Sénat participe donc à la réalisation du bonheur des citoyens, même si cela n’est pas quantifiable.
De même, l’élection est un moyen de participation des citoyens à l’exercice du pouvoir. L’élection des sénateurs par les conseillers municipaux et régionaux est un moyen de participation des citoyens au processus décisionnel. Ce qui renforce, dans une certaine mesure, le contrôle citoyen de l’action publique.
Par ailleurs, le Sénat dans son fonctionnement, renforce les mécanismes de gouvernance socioéconomique du pays. Le gouvernement soumet au Sénat pour débat, les projets, programmes et politiques publiques qu’il élabore. A cette occasion, le Sénat s’assure de la prise en compte des besoins des citoyens, de l’adéquation des politiques publiques de l’Etat aux besoins réels, ainsi que l’impact potentiel de ces politiques publiques sur le quotidien des populations. Le Sénat exerce donc un contrôle a priori des politiques publiques de l’Etat, assorti des suggestions et recommandations.
Enfin, le Sénat renforce la cohésion et la paix sociale, en veillant à l’équilibre dans le développement des collectivités. Représentant les collectivités territoriales, il s’assure du développement équilibré des différentes collectivités territoriales par la prise en compte de leurs diversités en termes de potentialités et défis dans une perspective de renforcement de la justice et de l’équité sociale. Or, la paix et la cohésion sociale sont indispensables pour la mise œuvre de tout projet de développement. L’apport du Sénat dans le fonctionnement et la régulation de la vie en société n’est pas marginal.
Au regard de ces quelques avantages, la balance avantages-coûts penche systématiquement vers les avantages. Le Constituant du 6 avril 2024 a donc fait œuvre utile.
Un gage d’alternance, un déverrouillage de plus de la vie politique.
Contrairement aux idées reçues ou répandues au sein de l’opinion, la Constitution de la V ème République favorise davantage l’alternance au pouvoir en garantissant une stabilité institutionnelle.
Primo, l’enjeu de chaque élection au Togo change. Les élections législatives et locales sont devenues les scrutins les plus importants. La pluralité des sièges à pourvoir décristallise le débat politique et réduit les tensions. Cela offre des possibilités de partage du pouvoir dans l’Etat qui n’est plus concentré dans les mains du Président de la République.
Secundo, l’architecture institutionnelle de la Vème République renforce les mécanismes d’alternance au sommet de l’Etat, même en milieu de mandat parlementaire dès lors que le parti majoritaire décide de désigner en son sein un nouveau chef de parti.
Tertio, les partis ont la possibilité de former des coalitions majoritaires au sein de l’Assemblée nationale pour désigner en leur sein un Président du Conseil et élire le Président de la République.
Quarto, les moyens d’action entre le gouvernement et l’Assemblée nationale (droit de dissolution de l’Assemblée nationale et la mise en jeu de la responsabilité politique du gouvernement) renforcent le contrôle réciproque et la collaboration nécessaires à l’efficacité et à la stabilité du fonctionnement de l’Etat.
- ISAAC